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Congrès Mission 2023

D'un clic, ici, retrouvez l'homélie de Mgr Jordy, du 1er octobre à la cathédrale.

L'homélie de Mgr Jordy

Frères et sœurs, chers amis venus vivre ce Congrès Mission ici à Tours,

1/ Il y a 2000 ans, le matin de la résurrection, par la puissance de l’Esprit Saint, la terre a tressailli quand le Christ est sorti libre et vainqueur du tombeau. Le jour de la Pentecôte, les Douze, des disciples et Marie et quelques femmes ont tressailli d’allégresse quand l’Esprit Saint a été confié à la jeune Eglise pour annoncer le salut.

A Marseille, il y a une semaine, le Pape François commentant la scène de la Visitation nous invitait à nous interroger sur le tressaillement en nous, sur l’action de l’Esprit Saint dans nos cœurs, dans nos vies : tressaillir, être touché, rejoint de l’intérieur par le Saint Esprit ; cette expérience qui nous rappelle que notre cœur n’est pas devenu dur, froid, enfermé et sûr de lui, indifférent.

Aujourd’hui, en ces jours, à Tours au cœur de ce Congrès, nous avons tous et toutes pu goûter, expérimenter, partager, transmettre ce tressaillement qui provoque la joie. « La joie de l’Evangile remplit le cœur et la vie de ceux qui rencontre Jésus » dit le pape François (EG 1). Et cette joie, qu’elle est-elle ? elle est le fruit de l’action de l’Esprit Saint en nous qui nous conduit à la foi. « Nul ne peut dire Jésus, Christ et Seigneur sans l’Esprit-Saint » (1 Co 12,3) dira saint Paul aux chrétiens de Corinthe  !

Oui être chrétien, c’est vivre, goûter ce tressaillement qui témoigne que notre cœur se laisse rejoindre par Dieu, qu’il s’ouvre à Lui. Ce tressaillement du cœur qui nous ouvre aussi à tout homme, à notre prochain, pour l’inviter à rencontrer Jésus, à vivre la joie de l’Evangile.

Chers amis, posons-nous la question en ce jour, demain, après-demain : ai-je vécu, goûté ce tressaillement de la foi, de l’espérance, de la charité ?

2/ Comment alors continuer maintenant sur notre route ?

Ce tressaillement, source de joie, ne doit pas non plus nous illusionner. Saint Ignace de Loyola nous invite à nous réjouir de cette dimension consolante de la vie chrétienne mais à rester vigilant. Nous pouvons être dans une forme d’illusion. Or nous le savons bien, dès que Jésus vit son baptême au Jourdain, que l’Esprit-Saint se manifeste, commence aussitôt le temps du combat spirituel.

Et c’était le futur Benoit XVI, Joseph Ratzinger, qui rappelait cela en décembre 2000 pour inviter à vivre la mission, la nouvelle évangélisation, de manière juste pour ne pas nous illusionner.

Il rappelait d’abord que s’il faut une nouvelle évangélisation, de nouvelles façons de faire dans un monde sécularisé, parfois agressif face à la foi, il fut se souvenir que l’Eglise durant toute son Histoire n’a jamais cessé d’évangéliser (Il y aurait de la prétention à penser le contraire). Le futur Benoit XVI rappelle qu’il y a une évangélisation permanente, celle des familles, des paroisses, des mouvements, des écoles qui transmettent la foi depuis des siècles même si cette évangélisation permanente est aujourd’hui plus difficile. 

a/ Il évoque alors les tentations que nous pourrions avoir au cœur de la mission, ou de la nouvelle évangélisation. La tentation de l’impatience de trouver un « truc », la méthode pour aller vite, et la tentation des grands nombres, du succès de masse. Il rappelle que ce n’est pas là une manière juste de vivre l’évangélisation. Les mouvements de masse sont toujours éphémères. Faut-il rappeler que le roi David a été châtié pour avoir compté ses troupes, qu’ils étaient des milliers à se réjouir à la multiplication des pains mais bien moins nombreux sous la Croix il y a 2000 ans ? L’évangélisation demande de la ferveur, de vivre la joie de l’Evangile mais de garder un cœur modeste, et surtout de ne pas faire le malin. 

b/ Le futur Benoit XVI ajoute un second point sur l’évangélisation, qu’elle soit l’évangélisation permanente ou la nouvelle évangélisation. Elle demande de ne jamais oublier « la condition fondamentale d’un authentique engagement pour l’Evangile » : Jésus n’a pas annoncé l’Evangile en son nom mais au nom de Celui qui l’a envoyé, son Père. Tout comme Jésus rappelle lors de son dernier repas que le don de l’Esprit-Saint sera fait à l’Eglise mais que l’Esprit Saint est l’envoyé du Père et du Fils. Evangéliser, c’est être envoyé.

Evangéliser suppose donc un décentrement de soi-même, de ses idées, de ses convictions, non pas pour les perdre, mais pour mieux les vivre dans l’Eglise et au service de l’Eglise. Le futur pape Benoit XVI le souligne : « L’annonce du Christ, l’annonce du Royaume de Dieu suppose l’écoute de sa voix dans la voix de l’Eglise »… Ne pas parler en son nom signifie parler dans la mission de l’Eglise ». En d’autres termes, la mission authentique demande modestie et d’être vécue non pas en « free-lance » mais comme membre du Corps du Christ qui est l’Eglise, en communion avec elle. Comme le disait sainte Jeanne d’Arc : « Le Christ et l’Eglise, c’est tout un. »

3/ C’est d’ailleurs, providentiellement, ce que nous rappelle l’Evangile de ce dimanche. 

La première lecture avant tout tiré du livre d’Ezéchiel nous montre la plainte des membres du peuple d’Israël qui ont été déportés à Babylone. Le peuple se plaint car il pense qu’il paye le péché de ceux qui les ont précédés et accuse finalement Dieu d’injustice : nos parents ont péché et nous avons été déportés. C’est pourquoi le prophète répond au nom de Dieu : Dieu n’est pas injuste, vous ne payez pas pour le péché des autres ; il n’y a pas de fatalité. Convertissez-vous et l’espérance vous sera donné.

Si le peuple s’est trompé à Babylone, ne comprenant pas l’action de Dieu, en raison de ses a priori; dans une compréhension fausse de Dieu lui-même, il en est de même au temps de Jésus. Jésus, dans le passage d’Evangile que nous avons entendu, reproche aux grands prêtres et aux anciens du peuple de ne pas savoir discerner correctement : ils ont vu venir Jean-Baptiste, ils ont vu venir Jésus mais ils n’ont pas su reconnaitre que le Messie promis à Israël se manifestait à eux ! Les publicains et les prostituées eux, même s’ils sont pécheurs, ont reconnu Jésus. Pourquoi ? Parce qu’ils ne sont pas enfermés dans leur suffisance, dans leurs certitudes inflexibles, ils ont été sensibles au « tressaillement ». Les grands prêtres, les docteurs de la Loi sont des gens très bien. Le vrai problème, c’est qu’ils le savent. Ils oublient que ce ne sont pas leurs pratiques, leur savoir qui les sauvent mais Dieu lui-même au cœur de leur pratique et de leur savoir. Le cœur d’une vie de foi authentique, le cœur d’une vie de disciple, de disciple missionnaire, c’est de ne pas s’appuyer sur soi-même, mais comme Jésus, de s’appuyer sur le Père, de fonder sa vie sur la volonté du Père, sur l’exemple de Jésus et la grâce de l’Esprit-Saint.

Frères et sœurs, nous venons de vivre de très belles journées de renouvellement pour la mission sur toute la France. Le Seigneur compte sur nous.

Nous avons goûté, nous avons expérimenté le tressaillement de la foi. A nous d’en vivre, de l’entretenir, comme de vrais disciples-missionnaires. A nous de l’annoncer, de le partager, comme de vrais disciples-missionnaires.

Avec modestie, en nous décentrant de nous-mêmes pour laisser le Christ et le Saint-Esprit vivre en nous et nous donner d’entendre la volonté du Père pour la mettre en œuvre pour la gloire de Dieu et le salut du monde.

Que saint Martin, que sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, patronne des missions intercèdent pour nous.

Amen.