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Année Saint Martin

Mgr Aubertin a célébré la messe de la "Saint Martin d'été" ce 3 juillet, en plein air, à Marmoutier, et a nous a invités, dans son homélie, à être nous aussi des disciples du Christ...

Dans le cadre de cette année où nous célébrons les 1700 ans de la naissance de saint Martin, nous voici réunis, ici, à Marmoutier, un  lieu si cher à saint Martin devenu évêque de Tours le 4 juillet 371… un lieu de respiration, un lieu de recueillement… lieu  où Martin reprenait force dans la  prière et la fréquentation des Ecritures… un lieu de ressourcement.

Alors que durant cette année nous nous sommes efforcés de redécouvrir  la figure de saint Martin, nous entrons aujourd’hui dans un second temps, celui de la sortie, de l’envoi, de la mission à l’école de Martin que la tradition  invoque sous le nom de 13e apôtre. Et voici que justement la liturgie de ce jour nous donne à entendre le récit que l’évangéliste Luc nous fait de l’envoi par Jésus de ses disciples…

Nous y voyons que Jésus ne tient pas un discours pieux, édifiant, moralisant, mais qui, une fois encore, va droit au but sans s’encombrer de périphrases : « Je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups ».  Cette image a quelque chose d’effrayant quand on se la représente concrètement. Une telle mission considérée à la lettre paraît inhumaine…

Pourtant à la lumière de toute l’Ecriture, seul Jésus est habilité à parler ainsi parce que le Père lui même l’a envoyé comme « l’agneau véritable» parmi les hommes et ceux-ci se comporteront avec lui comme de véritables loups qui iront jusqu’à le mettre à mort.

Il est Lui, Jésus, l’agneau véritable et sans tache… il est l’envoyé du Père… il est celui qui est venu dans le monde totalement désarmé, fort de sa seule obéissance au Père, fort de la mission que celui-ci lui a confiée, fort de son OUI donné et jamais repris : « Voici que je viens, o Père, pour faire ta volonté »…  Il sera le témoin fidèle qui se laisse  dessaisir de tout par amour, pour nous montrer le chemin du retour au Père…

Mais nous le savons, la mission confiée au Fils ne se termine pas au soir du vendredi saint… Le Christ agit toujours dans le monde par ceux qui acceptent de répondre comme lui à l’appel du Père… Le  Christ agit toujours par son corps qui est l’Eglise, il agit toujours à travers ceux qui, comme Martin, accueillent la force de l’Esprit-Saint et vivent en véritables témoins de l’AMOUR.

L’envoi des 72 disciples se poursuit dans l’histoire par la mission des saints comme le saint diacre Laurent, Vincent de Paul, Jean Baptiste de la Salle, Sœur Emmanuelle, Mère Teresa ou l’Abbé Pierre… elle se poursuit avec les saint tourangeaux comme  Martin, François de Paule, Marie de l’Incarnation, Marie Poussepin… mais aussi  M. Dupont, le « saint homme de Tours » ou plus près de nous  un  Père Gaston Pineau qui a su lui aussi incarner la charité en actes dans notre Touraine…

L’envoi des disciples se poursuit par la mission qui est celle de tous les baptisés…

Pour répondre à son appel le Christ nous donne quelques indications capitales :

  • Pour ressembler à celui que l’on annonce, il faut le suivre et employer les mêmes moyens que LUI : il s’est dépouillé de tout, il s’est fait humble, doux… Nous ne pourrons répondre en vérité à l’appel du Christ qu’en nous dépouillant de nous-mêmes, qu’en nous mettant à son école, qu’en imitant son amour totalement désintéressé…
  • Le disciple n’est pas un homme isolé : le disciple est témoin, témoin de l’Amour de Dieu pour l’humanité et pour une humanité bien concrète qui commence par celui dont on est, dont se fait le plus proche… car beaucoup plus que les discours, le témoignage qui porte le plus est celui de la vie.
  • On n’est pas chrétien tout seul parce que la foi est reconnaissance de Jésus présent au cœur du monde, présent au cœur du frère…

On ne témoignera vraiment de Jésus que si l’on est membre d’un corps, que si l’on est plusieurs parce que l’amour se donne, se partage. Je ne peux m’empêcher d’évoquer ce que l’on appelle la sagesse des Pères, la sagesse des premiers moines… A ce moine épris de perfection qui désirait quitter sa communauté pour ce qu’il estimait être une vie plus parfaite… la vie érémitique… son Abbé répondit : «  De qui vas tu laver les pieds ? » autrement dit, comment sera tu serviteur… allusion à ce geste de Jésus humble serviteur de tous…

  • Pour aimer vraiment, il faut être plusieurs… pour donner, pour recevoir, pour pardonner… il faut être plusieurs… alors Jésus les envoya deux par deux… pour être signes d’une charité vraie…
  • Jésus envoie ses disciples pour annoncer la PAIX… cette paix est comme le signe de la présence de Dieu parmi les hommes.  A Noël, les anges la chantent, elle traverse tout l’Evangile… que de fois entendons nous le Christ proclamer « va en paix ».

Le juste a le cœur en paix, car il est plein de Dieu.  Annoncer la paix, souhaiter la paix,  c’est demander à notre interlocuteur de s’ouvrir à Dieu, de le recevoir, de se laisser tout entier saisir par Lui…
Etre artisan de paix, c’est transmettre Celui qui nous habite et non pas imposer nos idées… c’est annoncer Dieu présent au milieu de nous.

Une dernière consigne enfin, une consigne à première vue anodine mais que Jésus reprend par deux fois : «  Mangez ce que l’on vous servira… mangez ce qu’on vous offrira… »

Quand on connaît un tant soit peu l’importance des prescriptions et interdits alimentaires décrits avec force détail, principalement dans le livre du lévitique, une telle recommandation revêt une particulière importance.
Jésus par cette consigne nous invite à nous ouvrir aux autres, à nous rendre proche d’eux, tout comme lui a su se faire proche de nous au point de partager en tout  notre vie humaine… au point de partager ce qui nourrit l’autre, ce qui le fait vivre… c’est là une invitation au plus grand respect de l’autre… une invitation à sortir de nous mêmes, de nos habitudes

Être disciple du Christ, n’est-ce pas finalement accepter de sortir de nous-mêmes comme nous y invite le pape François ?… N’est ce pas vivre en frères qui donnent, partagent et reçoivent le meilleur de ce qu’ils ont, le meilleur de ce qu’ils sont… N’est ce pas sortir de nos idées, de nos habitudes, de nos routines, pour accueillir l’unique nécessaire : le Royaume de Dieu et sa paix…

-    Ce sont là les consignes que Jésus a donne à ceux qu’Il a envoyés … ce sont les consignes que Martin s’est efforcé de mettre en pratique…  ce sont les consignes que Jésus continue à donner à tous les baptisés.
-     Et à tous ceux qui d’une manière particulière acceptent de le suivre comme prêtre, religieux, religieuses…
-     N’ayons pas peur de répondre avec générosité à l’appel du Christ.
-    Martin a su vivre en véritable disciple de Jésus, a su vivre en véritable pasteur, en véritable missionnaire alors mettons nous en route…
-     Soyons disciples de saint Martin…


Bernard-Nicolas Aubertin, archevêque de Tours, le 3 juillet 2016 à Marmoutier

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