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"Dilexit Nos"

La quatrième encyclique du pape François est sortie fin octobre. Présentation.

Joie de lire cette quatrième encyclique du pape François. Il faut se souvenir que la première avait été rédigée par le pape Benoit XVI (La lumière de la foi, Lumen Fidei en 2013). Si la deuxième a interpellé même les non chrétiens sur la « Maison commune » (Laudato si’ en 2015), la troisième a poursuivi la réflexion du pape sur la dimension sociale de l’évangélisation et l’amitié sociale (Fratelli tutti en 2020).

Dilexit nos (« Il nous a aimés » Rm 8, 37) qui vient d’être publiée sur l’amour humain et divin du coeur de Jésus Christ apparaît comme une synthèse de l’Évangile. L’aventure de la foi est une aventure spirituelle qui part du coeur de Dieu et y retourne. La spiritualité du Sacré-Coeur de Jésus concerne toute l’Église, car « le coeur du Christ est le centre de la miséricorde. C'est le propre de la miséricorde, qui se salit les mains, touche, veut s'impliquer avec l'autre... s'engage avec une personne, avec sa blessure ». La pape ne cesse de le redire à l’occasion du synode sur la synodalité, l’essentiel n’est pas dans des réformes de structures mais dans une conversion de tous à la compassion de Dieu vécue jusque sur la croix par Jésus Christ. La dévotion au Sacré-Coeur est bien sûr liée à l’expérience spirituelle de Marguerite Marie Alacoque en 1673, mais elle rejoint une large tradition spirituelle française avec Saint Claude de la Colombière, Saint Jean Eudes, Saint François de Sales, Saint Charles de Foucauld, Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et tant d’autres. La première partie de l’encyclique nous invite à reconnaître la place essentielle du coeur dans la vie humaine et chrétienne. « On pourrait dire que je suis mon coeur, car c'est lui qui me distingue, me façonne dans mon identité spirituelle et me met en communion avec les autres. » L’unité d’un homme s’exprime dans cette référence au coeur : « Le coeur est également capable d'unifier et d'harmoniser l'histoire personnelle, qui semble fragmentée en mille morceaux mais où tout peut avoir un sens. C'est ce que l'Évangile exprime avec Marie qui regardait avec le coeur. » La dévotion au Coeur du Christ n’est pas le culte d’un organe séparé de la personne de Jésus. « Si aujourd’hui encore le coeur est perçu dans le sentiment populaire comme le centre affectif de tout être humain, c’est lui qui peut le mieux signifier l’amour divin du Christ uni pour toujours et inséparablement à son amour humain. » Le coeur de Jésus Christ exprime la profondeur de sa mission trinitaire et nous interdit tout dualisme « celui des communautés et des pasteurs qui se concentrent uniquement sur les activités extérieures, les réformes structurelles dépourvues d’Évangile, les organisations obsessionnelles, les projets mondains, les réflexions sécularisées, les propositions qui se présentent comme des prescriptions que l’on veut parfois imposer à tous. Il en résulte souvent un christianisme qui oublie la tendresse de la foi, la joie du dévouement au service, la ferveur de la mission de personne à personne, la fascination pour la beauté du Christ, la gratitude passionnée pour l’amitié qu’Il offre et pour le sens ultime qu’Il donne à la vie. » Avec le Christ, nous sommes appelés à construire une nouvelle civilisation de l’amour sur les ruines que nous avons laissées en ce monde par notre péché. Telle est la réparation que le Coeur du Christ attend de nous. « C’est précisément parce que la réparation évangélique a cette forte signification sociale que nos actes d’amour, de service, de réconciliation, pour être effectivement réparateurs, ont besoin que le Christ les pousse, les motive, les rende possibles. » « La réparation que nous offrons est une participation que nous acceptons librement à son amour rédempteur et à son unique sacrifice. » La mission, nous dit le pape a besoin de missionnaires « amoureux ». « Aujourd’hui, tout s’achète et se paie, et il semble que le sens même de la dignité dépende de ce que l’on peut obtenir par le pouvoir de l’argent. Nous sommes pressés d’accumuler, de consommer et de nous distraire, prisonniers d’un système dégradant qui ne nous permet pas de voir au-delà de nos besoins immédiats et mesquins. L’amour du Christ est en dehors de cet engrenage pervers et Lui seul peut nous libérer de cette fièvre où il n’y a plus de place pour un amour gratuit. Il est en mesure de donner du coeur à cette terre et de réinventer l’amour, là où nous pensons que la capacité d’aimer est définitivement morte. »

Père Jean-Marie ONFRAY

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